©Editions de Mortagne 2012, Sophie Laroche
Quand l'alcool au volant anéantit une bande d'amis, comment survivent ceux qui restent?
"Depuis cette fameuse soirée chez John, Félix en parle sans arrêt à Nathan, son meilleur ami. Il ne cesse d’évoquer cette fête où ils ont bu plus que de raison. Normal, ils sont en âge de s’amuser ! Et bien sûr qu’ils étaient en état de conduire pour rentrer !
Il parle de l’accident, et des jours qui ont suivi : leur copain Zach, toujours dans le coma, Noah, si différent depuis. Il raconte le regard des autres, la difficulté de revenir à une vie normale, après « ça ».
Mais Nathan ne répond pas.
Nathan est mort.
Mort dans ce virage…
Une fraction de seconde où quatre vies ont basculé à jamais. À cause de l’alcool au volant. Pour quelques verres en trop, Félix a mis le V du verbe Vivre entre parenthèses. Ivre, il a cessé de Vivre. Il va pourtant bien falloir continuer. Survivre à l’absence de l’un, espérer la guérison de l’autre. Se supporter les uns les autres. Se supporter soi-même. Si c’est encore possible…"
Il est magnifique et terrible à la fois, ce roman. Impossible de ne pas en être remué, de ne pas penser à protéger ses proches, à passer le message aux ados et à tous les autres aussi. La force de Sophie Laroche c'est de ne pas être moralisatrice mais fine et subtile, de mêler la gravité oppressante à l'écriture lumineuse. Bien sûr il y a un message derrière, une mise en garde, mais le récit est si prenant qu'on évite le ton "campagne de prévention". La parenthèse du titre est très symbolique du récit. La culpabilité, les regrets et la colère dévastatrice pèsent sur les proches après la disparition de Nathan. Mais après cet anéantissement la vie continue, inéluctablement, presque injustement. Si c'est Félix le narrateur, celui que le lecteur accompagne le plus dans son dialogue avec le disparu, les réactions des autres personnages sont tout aussi puissantes, réalistes et poignantes.
Les Editions de Mortagne sont québécoises, et leur collection "Tabou" aborde de nombreux sujets rarement osés en littérature adolescente; l'homosexualité, le suicide, les secrets de famille, la violence en amour... leurs titres sont maintenant accessibles en France pour notre plus grand plaisir (avec expressions québécoises conservées!!). Et si je n'accroche pas forcément avec leurs choix d'illustrations de couverture, en tout cas je recommande chaleureusement leurs textes forts!
Lire un extrait là
Commentaires
Faelys, j'ai la chair de poule en lisant ta critique... Tu as encore une fois tout compris. J'en suis d'autant plus touchée que j'ai appris hier le décès q'un jeune de mon entourage, d'une overdose...
Merci aussi pour cette belle mise en avant de la collection tabou, je viens de lire des très beaux titres de cette série !
Grosses bises
>Sophie: comme toujours, c'est juste un plaisir immense. merci à toi et à ton clavier (pense à enregistrer régulièrement, quand même).
Ce matin il y a eu un gros accident au coin de ma rue ,par une belle matinée ensoleillée ..on ne pense pas à ça ;et c'est vrai qu'on pourrait parfois prévoir pour éviter l'accident .Alors j'espère que beaucoup de gens liront ce livre après une si bonne critique et j'ajoute que j'adore la parenthèse du titre.
>v: c'est vite arrivé, et des piqûres de rappel comme celle offerte par ce roman sont les bienvenues!! merci pour ton comm. moi aussi je suis fan du clin d'oeil du titre!
Un livre qui a l'air d'être efficace.
J'ai déjà entendu parler de cette maison d'édition et de leur collection aux romans "coup de poing". Un thème très difficile, mais s'il n'est pas traité de manière trop moralisatrice alors pourquoi pas.
>Alex-mot-à-mots: je vais tester sur mes zélèves, à voir
>Paradiseandco: je vais moi même lire d'autres titres de cette collection bientôt pour repérer si le ton est toujours aussi juste
J'aimerai beaucoup le lire.
>Johanne: prépare toi à être remuée, mais c'est une superbe lecture!
C’est vraiment courageux aux Editions de Mortagne de traiter de tels thèmes...
>Escrocgriffe: oui, et leur catalogue s'agrandit puisque le succès est au rendez-vous. il faut croire que ça manquait!